La pyrénéa 2006
Décidément, mais ça, en ce premier trimestre 2006, je ne le sais pas encore, cette année sera riche en évènements mais aussi tout simplement en découverte(s)…
Ça fait des années et des années que je vais, chaque fin d’hiver pratiquer le ski de randonnée dans les Pyrénées. D’ailleurs, depuis 2003 et mes débuts en triathlon, c’est même devenu un rituel de préparation. J’y vais par deux fois, en mars et avril et, au-delà de mes grosses journées de montagne en solitaire (je sais, je suis aussi un peu un ours, et, dans les Pyrénées... What else ?), je passe le reste du temps à nager, courir et bien sûr, grimper les cols à vélo, le tout en fonction de la météo annoncée.
Je sais que tous les ans, le dernier week end de mars, a lieu le célèbre triathlon des neiges au départ de Pau, La Pyrénéa : 19 km de course à pied depuis le Château de Pau jusqu'à Rébénacq (D+ : 135m) puis, ascension à la station de ski de Gourette à vélo, 35 km (D+ : 1 135m) et ski de randonnée, peaux de phoque jusqu'à 1986 m (D+ : 630m) et redescente.
Cette année 2006, c’est décidé, il faudra bien de toute façon que je me fasse ça au moins une fois, donc, je m’y inscris. Je vais alors planifier une de mes semaines habituelles dans la région à cette période.
J’ai voulu (sans doute) trop en faire... Les deux jours précédents, je reconnais le parcours vélo (que je connais d’ailleurs très très bien), je me fais aussi la partie ski de rando et je vais également courir un peu. Peut-être, sans doute tout ça histoire de me rassurer ...
Pour la logistique, il me faut aussi trouver un endroit pour stocker mon vélo à la station de Gourette après la course car, le jour de l’épreuve, on vient poser nos vélos au parc N° 1 à Rébénacq et ensuite, ce sont des bus qui nous emmènent au départ à Pau. Une fois la course terminée, il faut ensuite se débrouiller pour revenir à Rénénacq et y retrouver nos autos et, là, pas question de remonter à Gourette ce même jour pour y récupérer mon vélo. Je trouve donc, sur le site d’arrivée, là où il est prévu des douches, en demandant gentiment, un endroit pour laisser mon cher bike et, revenir le chercher le lendemain. Tout ça, ce n’est pas forcément grand-chose mais, à gérer seul, ça peut devenir facilement un (vrai) casse-tête . Bref, ça, c’est réglé.
Fin mars, comme vous le savez depuis maintenant près de quarante ans (1976), on passe à l’heure d’été et, on « perd » une heure . Comme je suis à environ 40 km (routes de montagne) de Rébénacq, là où on doit déposer nos vélos (et skis qui eux, seront acheminés à Gourette par les organisateurs), il faut donc que je me lève à 3 heures du matin (soit 2 heures à l'ancienne heure) afin d’être sur place à l’heure. Autant dire que quand le réveil sonne… Waouh, dur !
Bien sûr, j’ai tout chargé dans la voiture la veille et, à l’heure prévue, c’est parti, direction Rébénacq au parc à vélos N° 1. Arrêté à un feu rouge dans Lourdes, machinalement, je touche la roue avant de mon vélo sur le siège arrière et là, stupeur ! Le pneu est totalement à plat ! Je me gare aussitôt et, profitant d’un réverbère allumé (pléonasme car, s'il avait été éteint, aucune raison de le mentionner... Pffffffff !), je change donc la chambre à air sur le trottoir. Ceux qui m’ont vus (rares, mais quelques voitures sont néanmoins passées) ont dû se dire, il est fou celui-là ! Sûr, réparer une roue de vélo sur un trottoir dans Lourdes à 4 heures du mat’, tu m’étonnes ! Sinon, selon la bonne vieille blague, j’aurais peut-être dû aller directement à la grotte, non ?... Qui sait ? ... on est à Lourdes ou pas ? !
Une fois cette montée d’adrénaline supplémentaire digérée, dont je me serais volontiers passée, je rejoins enfin le point A. Je pose mon vélo dans le parc, je place mes skis là où c’est indiqué, que l’organisation les prenne et les achemine à Gourette au 2ème parc à vélos.
On monte dans les bus et direction le château de Pau, là où sera donné le départ. Dans le bus, je suis assis à côté d’une sympathique dame à qui je raconte ma raison d’être ici, moi, Tourangeau un peu (voire beaucoup) perdu dans ce milieu de montagnards avertis. Elle me dit que, pour elle, quelqu’un va monter à Gourette avec sa voiture pour qu’elle puisse être autonome là-haut après la course. Ma chance, elle a un porte-vélos et me propose (bon, ok, je lui ai demandé, elle n'a pas fait cela spontanément à la vision de mes "beaux yeux" !) de charger le mien et de me ramener à Rébénacq après la course. Sympa, super , ça m’évitera de revenir le lendemain, juste pour chercher mon vélo.
Le départ est donné, c’est magnifique de s’élancer depuis les jardins du château qui dominent la vallée avec au loin, en toile de fond, le mythique Pic du Midi d’Ossau et les montagnes où nous devons aller . Ça parait même un peu irréel, se dire que dans quelques heures, juste à la seule force des mollets, on sera tout là-haut, à la fois si près mais si loin... ! La météo annoncée est bonne, couverture nuageuse mais sans précipitations, juste un vent très soutenu, notamment violent en montagne…
Je me traîne comme un hérisson asthmatique croisé avec une tortue paraplégique (jolie bestiole que ça doit faire, ça !) pendant les près de 20 bornes pour rallier Rébénacq au parc à vélo… Décidément, la journée ne s’annonce pas terrible… Y’a des jours comme ça, pas de jambes du tout… (Et encore, qu’est-ce que je devrais dire maintenant !) Pour autant, j’ai le moral, je ne suis pas là pour la gagne , sinon, ça se saurait, donc, je profite ! Je monte sur le vélo et cool, je grimpe tranquillement en tournant bien les jambes : Laruns, Les Eaux Bonnes, les paravalanches et me voici à la station de Gourette …
Je sais qu’il y a des barrières éliminatoires mais, je n’y ai pas vraiment fait attention… À tort car une fois posé le vélo et enfilé mes pompes de ski de randonnée, je me pointe à la sortie du parc, mes skis à la main pour chausser et là, j’entends : STOP Monsieur , c’est trop tard, on vient juste de fermer la course. Ouiiiiiiiiiiin … Si j’avais su, sûr que je me serais un peu dépêché, quel con ! Y’a pas d’autre mot ! Mais bon, comme je disais plus haut, y’a des jours comme ça, ça ne veut pas ! J’explique au gars que je suis venu spécialement de Touraine pour faire la course, ect, etc. De toute façon, je n’insiste pas, je sais que c’est totalement de ma faute. Je retourne à ma place en me disant, tant pis, ça te servira de leçon. Je suis à peine arrivé que j’entends le gars derrière moi et qui me hèle : eh, est-ce qu’au moins tu es en forme, as-tu les capacités (physiques) de monter ?... Ô que oui, sûr que j’ai encore toute ma lucidité et qu’il me reste un paquet de forces pour grimper et terminer… Je lui explique que c’était juste pour prendre mon temps, que si j’avais su… Et alors là, il me regarde et me dit : bon, allez, viens, passe devant moi, tu seras le dernier , c’est moi qui ferme la course (un skieur balai en quelque sorte !) .
Alors, merci, merci, cool, je m’élance devant lui en giclant à toute vitesse ! Eh, m’hurle-t-il, moins vite, tu ne vas pas finir à ce rythme. Si, si, (toujours pas l'impératrice, hein !), t’inquiète, j’ai la patate, tu ne connais pas la bête ! Et c’est vrai, d’ailleurs, ça m’a décuplé les forces ! Il me donne quelques conseils de meilleure glisse, moins lever mes skis, etc. De suite on rattrape 4 ou 5 gars qui eux, sûr, sont un peu (voire beaucoup) à l’agonie … Je dis à mon sauveur que c’est OK, que je le quitte, que je le laisse gérer, faire son job avec les derniers, et merci encore de m’avoir accepté in-extremis. Je le reverrai après la course, on discutera un peu plus tranquillement, il pensait que j’étais naze et comme, c’est vrai, la limite horaire était juste tombée, eh bien, tout simplement il appliquait le règlement. Ouuuuuuuf !
Je grimpe cool, je pousse bien mes « planches » devant moi. Le vent s’est effectivement renforcé, ça soufffffffffle dur, de violentes bourrasques. Il n’en faut pas plus à une concurrente, juste à 10 mètres au-dessus de moi pour se retrouver le nez dans la neige. C’est vrai que visiblement, elle n’est pas bien épaisse, taillée dans une portière de Solex, et une bourrasque l’a carrément jetée à terre neige… !
Arrivé au sommet (à près de 2 000 m d’altitude), je « déphoque » (c’est le terme employé pour dire qu’on retire les peaux de phoque* des skis), plie les peaux, les mets dans mon sac à dos, ressert mes fixations de chaussures, bloque celles des skis en position descente et zou, c’est parti pour 600 m. de D –, tout shusssss jusqu’à la ligne d’arrivée !
Quelle journée ! Pour une première, ça méritait quand même le détour, d’être venu et d’avoir participé !
Je retrouve ma compagne de bus comme prévu après la remise des récompenses, on charge nos vélos et elle me redescend dans la vallée à Rébénacq. Ma voiture est là, elle m’attend, retour dans mon logement à Beaucens et… Dire qu’il va falloir que j’attende 7 mois pour récupérer mon heure (d’été) perdue ! Quoique, d’ici là, il va s’en passer des choses en cette année 2006 … Mais ça, je ne le sais pas encore... (Voir mes récits suivants)
* les peaux de phoques étaient à l’origine de vraies peaux (Pov’ bêtes ). Depuis bien longtemps, elles ont été remplacées par du synthétique...