Embrun 2005
Depuis mes débuts, il y a deux ans, y’a pas à dire, je suis « tombé dedans », j’ai choppé le virus comme on dit dans le milieu… Je suis même carrément devenu addict, y’a pas d’autres mots et, à ma connaissance, même encore de nos jours, aucun antidote efficace n’est connu. En terme médical, ça s’appelle la bigorexie. Eh oui, c’est une « vraie » pathologie, même reconnue par l’OMS… Remarque, entre cette maladie là et toutes les autres saloperies qui existent, mon choix est déjà fait. Mais bon, là, je m’égare … Revenons à nos moutons !
Embrun, j’y suis revenu (aussi) l’année dernière en 2004, j’y ai amélioré mon chrono d’environ 1 demi-heure au passage, rien de glorieux pour autant, à ma place tout simplement, dans les profondeurs du classement… Mon copain Éric (Balou), footeux de ma commune, Sorigny, avait appris ma participation de 2003 et, connaissant aussi Embrun de réputation, était venu me voir pour me dire, ça me plait, je me lance aussi cette année ! Dont acte, chapeau , car comme moi, ni nageur, ni rouleur ni coureur à la base. Il y prendra goût et fera aussi Nice en cette année 2005 avant Embrun à nouveau puis Roth l’année suivante en 2006.
Mais, 2005, c’est une année particulière pour moi ici. En effet, contrairement à 2003, 2004 et toutes mes autres compétitions « d’envergure », cette fois, je ne suis pas SEUL . Je vais pouvoir partager cette course, cette ambiance, cette atmosphère si particulière…
Depuis deux ans que j’en parlais autour de moi, à qui voulait bien m’écouter, mes proches entre autre, pour ne pas dire que je leur en rebattais les oreilles… Si, si, (pas l’Impératrice, hein !), c’est bien les termes qui conviennent depuis deux ans ! Alors cette fois, cette année, sûr, je serai accompagné sur les terres Embrunaises…
D’abord, mes parents vont me rejoindre au camping (les emplacements ont été réservés) avec leur fidèle VW T3 culte, accompagnés de leurs amis Madeleine et Guy, passionnés de vélo et de sport en général. Seront aussi présents ma sœur et Charly, mon beau-frère, passionnés de sports eux aussi qui, en vacances auprès de l’Alpe d’Huez, ne vont pas rater l’occasion de découvrir grandeur nature ce qu’est ce fameux triathlon d’Embrun sur lequel il se raconte tellement de choses.
Mon copain Éric (Balou), est donc là (voir plus haut), des amis du club de vélo de Sorigny seront aussi présents, ainsi que d’autres de Bordeaux dont Jean-Jacques (et ses parents, mordus de vélo), cycliste « longues distances » reconnu, qui lui aussi se dit : Embrun, pourquoi pas moi ?
Cette année également, me rejoindra Delphine, une amie (et collègue) Tourangelle avec qui je partage ma vie affective en ces mois d’été... Elle connaît Embrun et son triathlon pour y être déjà venue (en spectatrice) quelques années plus tôt. Elle aussi est très sportive, beaucoup de course à pied (Marathon de La Rochelle prévu en novembre) et débute en triathlon. On en fera d’ailleurs deux ensemble (pas des enfants, hein, des triathlons !), Parthenay et St Cyr dans la Vienne (voir mon récit de Parthenay 2005). Delphine n’ayant pu se libérer professionnellement plus tôt, j’irai la chercher à la gare d’Embrun le matin de la veille de la course.
Autant dire que cette fois, cette année, la solitude ne risque pas de me peser… Cela m’est-il déjà arrivé d’ailleurs… ?...
J’ai récupéré mon dossard depuis deux jours, mon vélo vient d’être déposé dans le parc pour le lendemain, on prend tous ensemble le temps d’apprécier le grand prix de D1 de triathlon, féminin et masculin qui a lieu ce jour là. Super de voir des champions de haut niveau international (la plupart des meilleurs triathlètes mondiaux sont licenciés dans les clubs français) en découdre ici !
Le soir, veille de la course, je donne à tout le monde mes temps estimés de passage à différents points du parcours, notamment la sortie de natation, le retour en bas d’Embrun après la première boucle de vélo, le passage au col d’Izoard, mon retour au parc… Etc. Tout le monde s’organise (se regroupe en auto, objectif, nous voir dans la montée de l’Izoard) pour pouvoir nous suivre, Éric, Jean-Jacques et moi.
Je ne vais pas à nouveau vous raconter tout en détail, voir « Embrun 2003 » pour ça. Juste l’essentiel. La météo est annoncée bonne en ce 15 août, pas de risques de précipitations et des températures de 27 à 28°, parfait.
Le départ natation est donné, 6h, comme d’hab’ ! Je sais que mes supporters sont sur les berges pour tenter de me voir. Pas facile déjà en temps normal (de jour) alors là, dans la nuit ou la pénombre, c’est peine perdue... Je sors de l’eau en 1h25’, un peu plus de 5’ de transition et c’est parti pour les 188 km de vélo !
Au passage de la première boucle, une quarantaine de km, juste avant de tourner à droite direction Baratier, je reconnais au loin plusieurs de mes amis qui sont là et m’encouragent ! Y'a toujours beaucoup de spectateurs ici, passage obligé bien sûr et juste à l'entrée de la ville d'Embrun. Beaucoup plus loin, avant de quitter la vallée du Guil à Château Queyras et d’attaquer l’Izoard, je reconnais ma voiture que j’ai confié à mon papa, accompagné de maman, Madeleine, Guy et Delphine. Ils arrivent derrière moi, montent à ma hauteur, juste le temps de leur dire que tout va bien et je continue à ma cadence. Ils vont m’attendre quelques km plus haut, stationnés dans un large lacet dans la forêt, juste avant de basculer vers la casse déserte. Vraiment sympa ! Le temps de quelques encouragements, bravo, vas-y, c’est bon … Je ralentis pour qu’ils prennent des photos … Mais non, je déconne ! A 10 ou 11 à l’heure maxi, ils ont tout loisir de faire quelques clichés, ça ne risque pas d’être flou !
Entre temps, dans la large vallée avant Arvieux, avant d’attaquer les lacets du col, je suis rattrapé par Éric. Il nage moins bien que moi, si, si, c’est possible , mais à vélo il va bien, faut dire qu’il a aussi quelques années de moins !
Je file à l’Izoard où, comme les deux années précédentes, je fais le choix de basculer direct dans la descente, je n’aime pas couper mon effort en règle habituelle… Je reprends Éric après Briançon avant la montée des Vigneaux, le temps d’échanger un peu sur nos ressentis puis il file à nouveau seul devant. Je n’essaie pas de le suivre, je gère tranquillement, d’autant que plus loin, c’est le fameux mur de Pallon, tellement redouté ! Je reprends à nouveau Éric plus loin, ce sera comme ça jusqu’au pied de Chalvet, la dernière difficulté, je bascule devant lui en haut et pose le vélo dans le parc une minute ou deux maxi avant lui. Il est 15h55’, je suis encore cette année très largement dans les limites des barrières éliminatoires en ayant quand même passé 8h25’ sur le vélo ! Mon petit massage habituel lors de la transition (8’56), le temps de voir qu’Éric est déjà parti et je m’élance à mon tour sur le marathon.
Dans l'Izoard... Smiling...
Dès le départ, je prends quelques secondes pour échanger avec les miens qui m’ont vu arriver à vélo et qui me guettent un peu plus loin derrière les barrières. J’apprends que mon copain Jean-Jacques de Bordeaux est « loin » derrière mais, il gère, il jongle avec les limites horaires et, pour l’instant, ça passe…
Je reprends rapidement Éric qui, comme souvent, galère un peu sur le marathon . Il m’a déjà fait le même coup à Nice au mois de juin…
Lors du deuxième tour de course à pied, je vois Delphine et mon beau-frère Charly qui ont décidé de m’accompagner. Ils vont galoper à mes côtés, à distances réglementaires car toute assistance, même mentale est interdite . Un arbitre viendra même me le signifier à un moment car il m’avait entendu discuter de loin avec eux… Bref, ça ne changera pas grand-chose de toute façon à mon classement final.
Pour autant, il y a un peu de suspens… Je sais que si tout va bien, je peux terminer « Sub 15 », c’est-à-dire en moins de 15h, il faut donc que je passe la ligne d'arrivée avant 21h… Certes, c’est loin d’être glorieux mais néanmoins, ça a toujours une certaine forme d’importance ces choses-là… Alors oui, je regarde régulièrement ma montre, je fais cent mille calculs dans ma tête pour me rassurer et me dire c’est bon, tiens le coup ! Hélas, plus je m’approche du plan d’eau pour y faire le dernier tour, plus je vois que ça va être plus que tendu, voire plus possible… Au niveau de la base nautique, c’est-à-dire tout au bout du plan d’eau, il me reste environ 1km et demi, là, je n’y crois plus . J’ai regardé ma montre juste avant et me suis dit, trop tard, ce n’est plus possible, tant pis, dommage mais bof, pas bien grave…
Je continue comme ça sans pour autant réduire ma foulée car c’est bien connu, quand le cheval sent l’écurie, il n’a qu’une hâte, c’est d’y être. Je contourne donc une dernière fois le parc à vélo pour me présenter sur cette dernière ligne droite moquettée bleue de la ligne d’arrivée. J’entends le speaker annoncer mon nom, ma famille et mes amis qui crient et voilà, une fois de plus, la troisième, je suis finisher à Embrun . Je me retourne, et là, je vois au chrono que celui-ci affiche 14h59’ et… 23 secondes ! À 37’’ près, c’est gagné, je suis « Sub 15 » ! Bon, ma vie de va pas radicalement changer pour autant, soyons clairs !
On me donne le tee-shirt, m’enfile la médaille autour du cou, je me dépêche de regagner le parc à vélo, d’en sortir et retrouver tous les miens, savourer cette journée qu’enfin, je n’ai pas vécu seul. Quel bonheur !
Et de trois !
Entre temps, Éric est arrivé, tout juste 20 minutes après et pour sa deuxième fois, lui aussi est finisher. Pour Jean-Jacques, ce sera beaucoup plus compliqué. Il va jongler avec les temps éliminatoires jusqu’au bout et terminera en 17h et 18 minutes… Eh oui, Embrun, c’est dur, ça se mérite et simplement le finir dans les délais, c’est respect !
Le lendemain, tous autour de grandes tables alignées dans le camping, ce sera la grande fiesta. À nouveau quelle joie d’avoir pu vivre et surtout partager tout ça. Cette journée du 15 août 2005 restera (à jamais) pour moi, sans écarter les joies que le basket m'a apporté pendant plus de 30 ans, la plus belle journée de sport de ma vie. Merci !